Il y a quelques années, j’étais sur mon canapé, un verre à la main, et face à moi se tenait une amie. Nous n’étions pas seules, mais notre discussion était si enflammée qu’on s’est complètement coupées du monde. Il était question du droit (pour elle) de la pertinence (pour moi) de se balader dans la rue avec une jupe courte. Cette discussion a marqué le début de mon intérêt pour le féminisme. Aujourd’hui, quand j’en parle avec elle, elle s’en veut de m’avoir secouée comme elle l’a fait (là où je ne la remercierai jamais assez de l’avoir fait).
Car de son point de vue d’aujourd’hui, on peut convaincre sans être obligé de secouer son interlocuteur.
C’est là qu’entre en jeu ce livre.
Mamie Luger, c’est une vieille dame qui est mise en garde à vue après avoir tiré au fusil sur son voisin. Lors de son interrogatoire, elle va se mettre à raconter sa vie. Et sa vie, comme l’écrit Le Nouveau Magazine Littéraire en 4e de couverture c’est « l’histoire d’une femme émancipée, anticonformiste et féministe indignée par la domination masculine ». Ce livre ressemble à une comédie, il n’y a pas de temps morts, les dialogues sont percutants, c’est drôle. C’est émouvant aussi. Ça claque comme les coups de la vieille dame qu’elle aura porté toute sa vie. Ça se lit si vite, si facilement, que ça semble léger. Alors que c’est loin de l’être.
Lorsque l’on referme ce livre, on prend conscience qu’on peut être secoué autrement qu’en ayant une discussion houleuse. On peut l’être avec une histoire comme celle de Mamie Luger.
S’aimer, c’est se dévoiler. J’ai cette phrase en tête en refermant ce livre.
S’aimer, c’est dire ses peurs, ses attentes et ses sentiments à l’autre. Exactement ce que ne parviennent pas à faire les deux héros de cette histoire. Pourtant, l’alchimie entre eux est évidente. A l’image d’Un jour de David Nicholls où les deux protagonistes passent un temps fou à se trouver, Connell et Marianne passent 4 ans (et 320 pages) à se chercher. Parce qu’ils ne parviennent pas à s’extraire du qu’en dira-t-on, des non-dits, de leurs incertitudes et de leurs failles, parce qu’ils ne se parlent pas, ou mal, ils se loupent. On assiste, impuissant, à leur jeu du chat et de la souris dans un suspense constant. C’est si addictif qu’il est impossible de le lâcher.
Alors oui, la construction et le style de ce livre peuvent décontenancer. Les dialogues, par exemple, ne sont pas indiqués par des tirets. Mais personnellement c’est une originalité que j’ai beaucoup apprécié. Et si l’on arrive à passer au dessus de ça, on plonge surtout dans une atmosphère particulière, avec une plume à la fois douce, vive et intelligente, des dialogues remarquables, et une finesse incroyable pour parler des sentiments.
Ce n’est pas tout à fait un coup de coeur, probablement à cause de certaines longueurs vers la fin et du fait que je l’ai involontairement comparé à Un jour (qui reste aujourd’hui encore mon plus gros coup de cœur livresque). Mais ça n’a en rien entaché mon plaisir de lecture.
Un million d’exemplaires vendus et une adaptation en série (que je vais m’empresser de regarder), de quoi vous inciter à sauter le pas, non ?
Vous me connaissez auteure. Mais je suis avant tout une grande lectrice. Pour moi, le premier va assez mal sans le deuxième. Je vous propose donc de répondre à ces quelques questions pour en savoir plus sur la lectrice que je suis.
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Quelle est la plus ancienne de tes lectures dont tu te souviennes ? L’album Rox et Roucky de Disney, que je lisais en boucle. J’avais 8 ans. • Quel est ton genre littéraire favori ? J’apprécie beaucoup la littérature française. Les romans qui me font réfléchir, voyager ou me bouleversent. Et si, en plus, ils traitent un peu d’amour, je suis comblée. • Qu’utilises-tu comme marque page ? Je prends ce qui passe. Un bout de papier, un ticket de caisse, un dessin d’enfant. Ce que j’adore quand je le réouvre, c’est de retrouver un souvenir du moment où je l’ai lu. • Quel est ton auteur préféré ? Anna Gavalda. Même si j’affectionne d’autres auteurs tels que @melissa_da_costa_auteure ou @valerieperrin_ • Lis-tu plusieurs livres en même temps ? Non. J’aime me plonger toute entière dans une seule histoire. • Ton endroit préféré pour lire ? Je suis assez peu regardante sur l’endroit. Canapé, plage, voiture… Du moment qu’il n’est pas inconfortable. • Lis-tu en musique ou en silence ? En musique. Ce que j’adore, c’est quand certains passages bouleversants me reviennent en tête en entendant la musique que j’écoutais à ce moment-là. • Sautes-tu des pages ou regardes-tu plus loin quand tu lis ? Je ne saute pas de page, par contre, j’ai une manie… quand on arrive à la fin d’un chapitre ou qu’une intrigue se dénoue, j’ai tendance à laisser mes yeux trainer sur les dernières lignes. Pour éviter ça, je cache avec ma main ! ???? • Annotes-tu les pages ? Jamais. Si j’ai besoin de me souvenir d’un moment précis dans ma lecture, je la prends en photo. J’ai d’ailleurs un album dans mon téléphone où je peux toutes les retrouver facilement. •
Je l’ai acheté pour sa couverture, parce que je la trouvais belle et que j’imaginais un livre joyeux. Je l’ai laissé trainer dans ma bibliothèque pendant plusieurs semaines, me refusant à lui laisser sa chance, parce que je l’avais vu partout, que j’avais peur d’être déçue, et puis surtout pour sa première page, que j’ai lu une fois acheté. Une histoire pas marrante sur un type atteint de la maladie d’Alhzeimer qui cherchait un compagnon de voyage pour l’accompagner durant ses 2 dernières années à vivre. Une première page qui prévoyait le non-négociable (la mort du personnage principal) et donc déjà les pleurs de la fin. J’ai attendu d’être dans de bonnes conditions moralement pour le choc que j’allais faire endurer à mon petit coeur. Et quand finalement, je me suis décidée à l’attraper dans ma bibliothèque, je ne l’ai plus lâché.
Que ce livre est beau ! Ce qui me vient tout de suite en repensant à ce bouquin, c’est la douceur qui se dégage des mots de l’auteure. Ces nombreux moments de vie où il ne se passe pas grand chose mais qui nous font apprécier le voyage et les personnages. Ce recul qu’elle nous fait prendre sur la vie. Ce bouquin, ce n’est pas une invitation à pleurer. C’est une invitation à découvrir, à se laisser porter, à s’émerveiller, via des secrets, des rencontres, de la résilience et de l’amour. Ce bouquin, c’est beaucoup d’émotions, c’est même un fou rire incontrôlable ! Ce bouquin, c’est exactement ce que prétend sa couverture ! Une invitation au voyage, mais pas n’importe comment ! En camping-car, avec son lot d’itinéraires inconnus, de gros imprévus et de nombreux ravissements.
Ce roman de Lola Lafon n’est pas léger. N’est pas feel good. N’est pas divertissant. Ce roman est puissant, perturbant, percutant. Et c’est pour toutes ces raisons qu’il faut le lire.
Les premières pages donnent le ton. On suivra l’histoire de Cléo, une adolescente qui veut devenir danseuse professionnelle. Très peu de dialogues. Un enchainement de faits et de pensées. On tourne les pages avec lenteur, pour appréhender les rêves de cette adolescente, son milieu modeste, sa détermination. Et puis il y a le tournant du roman. Le moment où elle commet l’erreur de faire confiance, d’être aveuglée par son rêve, de ne pas voir, de ne pas comprendre qu’elle tombe dans un piège, qu’elle est abusée et qu’elle entraine d’autres filles dans sa chute. L’erreur tant reprochée de ne pas avoir su dire non. On tourne vite les pages pour savoir ce qu’il s’est passé ensuite. Mais on ne suit plus Cléo, on suit ceux qui l’ont côtoyée. A travers les années et à travers leurs histoires, on apprend, par bribes, sa difficile reconstruction, les conséquences sur sa vie, ses relations, son rapport au corps et à son propre pardon. On comprend que la vie continue, mais que plus jamais elle ne sera la même. J’ai refermé le livre en pleurs. Sur cette dernière page, sur ce dernier passage, cette dernière phrase, bouleversantes.
Ce roman est tout sauf léger. Ce roman chamboule. Et c’est pour cette raison que je vous conseille de le lire.
Comme d’habitude, je vous déconseille de lire la 4e de couverture (surtout celle-ci, qui pour moi en dit trop)(mais si vous y tenez vraiment, faites défiler les photos). Lisez plutôt les premières pages (voir photos).
Citation : « Elle n’avait pas su attendre : elle avait emprunté le premier détour. Cathy avait entrebâillé l’avenir et Cléo s’était précipitée, un pied dans la porte, le nez au vent, prête à sauter toutes les cases du jeu »
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